Au château de Brancion, les amours de deux amants maudits se mue en serment de sang. Plus de détails avec Info Chalon.
Et, dit-on, leurs âmes veillent encore sur un trésor qu’aucun vivant n’a jamais trouvé.
Sous les pierres du vieux château de Brancion, la rumeur court depuis des siècles : un amour trahi, un trésor scellé par le sang, et deux âmes condamnées à veiller sur leurs serments.
La forteresse des ombres
Dominant les collines de la Saône-et-Loire, le château de Brancion dresse encore sa silhouette fière au-dessus des toits du bourg médiéval. Ses tours éventrées, son donjon muet et son chemin de ronde suspendu rappellent l’époque où les seigneurs de Brancion, vassaux des ducs de Bourgogne, régnaient sur les vallées du Mâconnais.
Mais à la tombée du jour, quand le vent s’engouffre dans les archères et que la cloche de la petite église romane sonne l’angélus, les habitants d’ici affirment qu’on peut entendre un gémissement montant du puits du château — un soupir mêlé d’amour et de douleur : celui d’Ermeline, la dame au serment brisé.
L’amour et la trahison
La légende raconte qu’à la veille de la deuxième croisade, le jeune chevalier Eulalius de Brancion, fiancé à Ermeline, jura de revenir vers elle après trois ans de guerre sainte.
Avant son départ, il confia à sa bien-aimée une bourse d’or et une croix d’argent, en lui faisant promettre de ne jamais aimer un autre homme, quoi qu’il advienne.
Les années passèrent, et nul ne revint de l’Orient. On crut Eulalius mort dans les sables brûlants de Syrie.
Un seigneur voisin, avide du domaine et séduit par la beauté d’Ermeline, la pressa d’unir leurs terres. Le cœur brisé, elle finit par céder.
C’est alors que, par une nuit d’orage, Eulalius reparut, hagard, le visage ravagé par les combats. Apprenant le mariage d’Ermeline, il entra au château en silence, la croix d’argent à la main.
Les récits divergent : certains disent qu’il tua le nouveau seigneur avant de se transpercer lui-même ; d’autres que les deux amants moururent enlacés, foudroyés par la colère divine.
Le trésor scellé par le sang
Depuis ce jour, nul n’a jamais retrouvé la bourse d’or d’Eulalius.
Les anciens de Brancion jurent qu’elle est toujours là, murée sous les dalles du donjon ou jetée dans le puits, mêlée au sang des deux amants.
Selon une croyance persistante, celui qui oserait chercher le trésor la nuit de la Saint-Jean verrait le fantôme d’Ermeline apparaître, tenant une lampe bleue, les yeux pleins de larmes.
On raconte encore que, certains soirs de vent d’été, deux silhouettes se dessinent dans les brumes de la vallée : un chevalier en armure et une dame en robe claire, marchant côte à côte vers les ruines du château.
Mémoire et traces du mythe
La légende d’Ermeline et d’Eulalius fut recueillie au XIXème siècle par plusieurs érudits locaux, dont Louis Chaumont, prêtre et folkloriste du Chalonnais, qui la publia sous pseudonyme dans les Chroniques du Vieux Mâconnais.
On y retrouve des motifs universels : le serment d’amour, le retour impossible, la faute et la réparation par la mort.
Les archéologues, eux, n’ont rien trouvé de la bourse ni de la croix, mais certains visiteurs affirment que les pierres du puits «transpirent» quand on parle d’amour trahi.
Aujourd’hui encore, les veillées d’été organisées par l’association «Les Amis de Brancion» se terminent souvent par le récit des deux amants maudits.
Et, à la lueur des bougies, on jurerait presque voir, dans la cour du château, une ombre féminine longer les murailles — fidèle à jamais à son serment.
À suivre…
Après les amants de Brancion et leurs serments d’outre-tombe, notre série Mystères du Chalonnais et de Saône-et-Loire prend la direction des rives de la Saône, là où l’eau cache d’autres secrets.
Demain, cap sur le Klupéa, étrange créature aquatique des nuits chalonnaises, mi-poisson, mi-ombre, dont les anciens juraient entendre le souffle sous les ponts et les reflets des marais.
Entre croyance, peur du fleuve et récits de bateliers, une plongée dans les eaux troubles de la légende.
Karim Bouakline-Venegas Al Gharnati
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