Assassinat de Narumi Kurosaki : au troisième jour d’audience, Nicolas Zepeda reconnaît « parfois, j’ai menti »

Les jurés et la cour ont paru assez stupéfaits mercredi matin après les déclarations de Nicolas Zepeda, ce Chilien âgé de bientôt 33 ans, jugé en appel devant les assises de la Haute-Saône à Vesoul. Est-ce une nouvelle tactique, est-ce un tournant, même une bascule vers des aveux ? Au troisième jour de débats, et pour la première fois depuis 2016, l’accusé a reconnu avoir caché des éléments durant l’enquête sur la disparition et l’assassinat de son ex-petite amie japonaise Narumi Kurosaki.  « Peut-être j’ai menti (là-dessus) mais aujourd’hui je n’ai plus peur, je vous dirai tout si jamais j’ai manqué à préciser. »

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« Je suis allé frapper à la porte de Narumi pour voir si on pouvait aller boire un café »

« Je suis rentré dans cette résidence pour frapper à la porte de Narumi » Kurosaki : accusé de l’assassinat de cette étudiante japonaise en décembre 2016, Nicolas Zepeda a reconnu mercredi pour la première fois, sept ans après, sa présence dans le bâtiment ou vivait l’étudiante japonaise. « Ça faisait un jour ou deux que j’étais à Besançon. Je suis allé frapper à la porte de Narumi pour voir si on pouvait aller boire un café », a déclaré Nicolas Zepeda en français, debout dans son box, veste polaire noire sur une chemise à carreaux.

La salle des assises du tribunal de Vesoul se fige. Depuis sept ans que Narumi Kurosaki a disparu, et que les soupçons se portent sur lui, jamais il n’avait reconnu s’être rendu jusqu’à la chambre de son ex-petite amie. « Dans quelle optique ? », reprend le président de la cour, François Arnaud. « Je voulais que les choses soient en bon ordre », explique l’accusé. Au moment de la rupture, « on avait parlé d’une suite plus constructive, de renouer une amitié, je voulais une réponse à cette interrogation. »

« Aujourd’hui je n’ai plus peur, je suis là pour vous laisser tout sur la table »

« Pourquoi avoir omis de donner cette information ? », poursuit le magistrat. « J’avais un peu honte de vouloir réessayer » de maintenir un lien avec la jeune femme, concède le Chilien de 32 ans. « Aujourd’hui je n’ai plus peur, je suis là pour vous laisser tout sur la table. Si jamais j’ai menti, si jamais j’ai omis, je vous le dirai », poursuit-il dans un français très fluide. Malgré les questions supplémentaires des parties, qui veulent chacune saisir cet instant de vérité pour obtenir d’autres révélations, Nicolas Zepeda s’en tient là. Mais en ce mercredi midi, une brèche s’est ouverte.

Sylvain Cormier et Renaud Portejoie, avocats de la défense, devant le box où est assis leur client Nicolas Zepeda durant les débats
Sylvain Cormier et Renaud Portejoie, avocats de la défense, devant le box où est assis leur client Nicolas Zepeda durant les débats © Radio FranceNicolas Piquet

« Peut-être j’ai menti, mais aujourd’hui je n’ai plus peur, je vous dirai tout si jamais j’ai manqué à préciser »

Pour en arriver là, il a fallu l’insistance de Renaud Portejoie, l’avocat de l’accusé, qui contre toute attente, bouscule son client. Une ancienne étudiante, Nadia Ouaked, qui logeait à l’époque dans la même résidence que Narumi Kurosaki, venait de témoigner. Elle affirme avoir vu Nicolas Zepeda dans la cuisine commune, au quatrième étage de la résidence, un jour de décembre 2016, quelques jours avant la disparition de l’étudiante japonaise.

« Je vois un garçon assis par terre derrière la porte, recroquevillé, j’étais surprise, j’avais un peu peur. J’ai pensé qu’il se cachait », explique la jeune femme, aujourd’hui âgée de 31 ans, qui a conservé son manteau à la barre. « Il avait les yeux gonflés comme quelqu’un qui a pleuré beaucoup, il avait les cheveux décoiffés, il était dans un sale état. Ça me faisait de la peine. »

« Est-ce que vous êtes bien sûr que vous n’avez pas pénétré au quatrième étage ? »

Quelques jours plus tard, quand les policiers recueillent son témoignage et lui présentent une planche avec les portraits de huit jeunes hommes pour identifier celui qu’elle a croisé, elle est formelle : il s’agissait de Nicolas Zepeda. « Vous entendez (la témoin), qui n’est pas là pour régler des comptes. Elle a eu de la peine pour vous », attaque Renaud Portejoie, s’adressant à son client. « Manifestement elle ne ment pas, je vous le dis comme je le pense. Est-ce que vous êtes bien sûr que vous n’avez pas pénétré au quatrième étage ? » Accablé, Nicolas Zepeda cède. « Quand vous êtes venu en France, le but était-il de rencontrer Narumi Kurosaki ? », insiste l’avocat. « Essentiellement, c’était pour rencontrer Narumi ! »

« Ce sont des éléments essentiels »

Jusque-là, le Chilien avait toujours soutenu qu’il s’était rendu en Europe depuis le Chili pour assister à un congrès en Suisse. « Depuis sept ans, Monsieur Zepeda a nié farouchement être rentré dans le bâtiment et être venu en Europe pour rencontrer Narumi Kurosaki. Ce sont deux évolutions majeures de ses dépositions », savoure l’avocat général, Étienne Manteaux, qui demande que ces déclarations soient dressées sur procès-verbal. Le président en donne l’ordre à la greffière. « Ce sont des éléments essentiels », approuve-t-il. Le procès doit se tenir jusqu’au 22 décembre. Nicolas Zepeda, qui nie toute responsabilité dans la disparition de Narumi Kurosaki, encourt la réclusion criminelle à perpétuité.

Une photo de Narumi Kurosaki, dans les mains de Sylvie Galley, avocate des parties civiles, au procès en appel de Nicolas Zepeda à Vesoul
Une photo de Narumi Kurosaki, dans les mains de Sylvie Galley, avocate des parties civiles, au procès en appel de Nicolas Zepeda à Vesoul © AFPSEBASTIEN BOZON

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