2,7 à 3 millions d’hectares de terres agricoles seraient « en état d’abandon » en France, selon les premières estimations du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER), chargé par le ministère de l’Agriculture d’une « mission de prospective » au sujet « des terres délaissées ».
C’est l’équivalent de « plus 10 % » de la surface agricole utile, précise le CGAAER dans un rapport intitulé « Stratégies d’usage des terres en France dans l’objectif d’assurer la souveraineté alimentaire et de préserver la biodiversité », publié mercredi 18 octobre 2023.
Les dix dernières années, l’agriculture a ainsi perdu, en moyenne tous les ans, « 60 000 ha, dont un tiers est artificialisé, un tiers passe à un usage forestier et le dernier tiers est abandonné ».
Pour les hauts fonctionnaires, cet abandon est un « angle mort » du « débat sur l’usage des terres agricoles et son optimisation en fonction des objectifs de souveraineté alimentaire et de protection de la biodiversité », dans lequel « est sous-jacente l’inquiétude sur l’insuffisance du foncier agricole pour nourrir une population croissante (débats sur l’artificialisation des sols, sur les arbitrages entre extensification ou intensification, place faite à la biodiversité…) ».
Peuvent-elles revenir à l’agriculture ?
Ces terres « sans usage », « hors artificialisation ou reboisement », pourraient-elles retourner à l’agriculture ? « On n’est pas sur les mêmes qualités de terrain », souligne Nicolas Agresti. Le directeur des études à la fédération nationale des Safer (Sociétés d’aménagement foncier et d’établissement rural) distingue « trois types de friches ».
Les parcelles qui sont « devenues définitivement inexploitables », comme des terrains pollués. Celles où l’agriculture a eu des difficultés à « maintenir sa présence ». Des terrains en coteaux compliqués à mécaniser, des petites parcelles difficiles d’accès, le recul d’une activité d’élevage… Et celles liées à la « rétention foncière », notamment en bordure de zone urbaine. Avec des propriétaires qui espèrent que « leur parcelle passe à bâtir » ou qui refusent de la mettre à « disposition de l’agriculteur qui est autour ».
Pour Nicolas Agresti, certaines sont « intéressantes » à repérer parce qu’elles pourraient faire l’objet d’une potentielle « reconquête agricole », d’autres parce qu’elles pourraient accueillir des activités « qui, autrement, iraient consommer du foncier agricole ».
Ces friches sont malgré tout « compliquées » à repérer, signale-t-il. Les territoires sont plus ou moins concernés par le sujet. « On a des situations très différentes ». Ainsi, « les Safer du nord de la France sont un peu moins concernées » par le sujet, selon lui, du fait de leur relief « moins montagneux » ou parce que ce sont des « secteurs à dominante grandes cultures » où « on a peu de problèmes d’enfrichement ».
Quelles démarches ?
Les Safer travaillent à identifier, qualifier et mobiliser ces friches, explique-t-il. S’il s’avère qu’elles sont « intéressantes en termes de reconquête agricole », les opérateurs fonciers, souvent en partenariat avec des collectivités, vont « porter les démarches pour essayer de les remettre à l’agriculture ».
Pour les mobiliser, « ça peut se faire par de la veille foncière, éventuellement de la préemption, pour maîtriser des friches qui partiraient vers des usages non souhaités », souligne Nicolas Agresti. Là où sont constatés, par exemple, des « détournements d’usage ».
Les Safer peuvent aussi faire de l’animation foncière, en allant à la rencontre des propriétaires. En ce qui concerne les « biens sans maîtres », les parcelles dont les propriétaires sont décédés, sans succession identifiée, ou qui ont été oubliées dans le processus, les communes peuvent en récupérer la propriété « au moyen d’une procédure administrative ».
Les départements, quant à eux, peuvent « mettre en demeure le propriétaire de mettre en valeur » une parcelle en état d’inculture ou « manifestement sous-exploitée » via la procédure « terres incultes ».
Au sujet de la rétention foncière, les élus, « par leurs outils de planification » peuvent « permettre d’essayer de freiner un peu ce phénomène » , souligne Nicolas Agresti.
Des terres à ne pas « négliger »
Pour Nicolas Agresti, « ce sont des espaces qui peuvent permettre un peu de compenser ce qui est prélevé par d’autres usages ». Pour autant, « l’artificialisation se fait beaucoup sur les excellents terrains agricoles de plaine alluviale. Elle se fait en extension urbaine, en général sur de très bons terrains. Il est rare qu’elle se fasse sur les terrains de coteau ».
L’objectif du zéro artificialisation nette pourra-t-il avoir des conséquences sur le nombre de terres agricoles abandonnées ? « C’est un sujet sur lequel on n’a pas vraiment de recul », répond Nicolas Agresti.
Pour le CGAAER, « dans le débat sur les usages des sols, en particulier en faveur de la biodiversité mais aussi compte tenu de l’évolution des zones d’élevage traditionnel où les terres sans usage agricole devraient progresser et susciter des projets d’installation de production d’énergie renouvelable (photovoltaïque), on ne peut négliger ces terres abandonnées ni celles qui retrouvent un état forestier. »
Contacté pour avoir plus de précisions sur la mission de prospective, via le ministère de l’Agriculture, le CGAAER n’est pas revenu vers nous.
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